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Sur les hauteurs de Muespach dans le Sundgau...
Mir rede Elsassisch

La vie mouvementée de M. Joseph Brand

durant la deuxième guerre mondiale

Monsieur Joseph Brand est né le 21 octobre 1927 à Muespach-le-Bas.

A l’âge de 16 ans, son père lui demanda d'aller donner un coup de main à sa tante, veuve, qui habitait à Willer pour les travaux agricoles. Un jour, ils eurent une visite surprise de la Gestapo accompagné d’un gendarme. Ils n'eurent aucune précision mais il y avait un soupçon comme quoi il se réfugiait à Willer.Joseph Brand

De retour au village en entrant dans la maison, il trouva sur la table une enveloppe officielle contenant un ordre de réquisition (Marchbefehl) de l’administration allemande pour se rendre à Mulhouse. Il était le seul mobilisé de sa classe à Muespach-le-Bas. Sa mère l’a accompagné jusqu'à la gare de Moyen-Muespach puis en train pour le voyage jusqu’à Mulhouse.

A son retour le "Burgermeister" la vit et lui lança : "Di Seppala chunnt nemmi Heim". Cela a profondément choqué sa mère. Comment pouvait-on être aussi odieux et sans scrupules" ?

Il y avait une haine de la part de certaines familles voisines car le Père de Joseph était déserteur lors de la guerre 14-18, il avait refusé de porter l’uniforme allemand. Et bien trop souvent ils ont dû entendre des commentaires mal placés et profondément vexants "c’est le tour des déserteurs" et ces personnes-là étaient les premières au moment de la libération à sortir et à brandir le drapeau français et à les implorer pour qu’ils ne les dénoncent pas. Ils ont également retenu la hardiesse de la part des libérateurs américains au moment de la libération.

Pendant l’occupation, le Bürgermeister (le Maire) de Muespach-le-Bas M. Theophile Gutzwiller avait été nommé "Ortsgruppenleiter" pour les trois villages de Muespach.

Durant cette période les parents demandèrent sans cesse aux enfants de se taire pour ne pas être dénoncé aux "SS" car ils craignaient d’être déporté ou l’on ne sait où, en Allemagne. Ils vivaient dans une peur constante et cela a réellement marqué les enfants lors de cette période.

De Mulhouse, Joseph a été transféré, dans un convoi formé de 24 wagons via Strasbourg, au Camp de Heppenheim et enrôlé à l’âge de 16 ans dans le "RAD" (Reichsarbeitsdienst – le travail obligatoire).

A leur arrivée, ils ont dû quitter tous les habits civils, revêtir l’uniforme allemand et furent coiffés d’un calot et non d’un casque car ce dernier était exclusivement réservé à l’armée. Ils n’avaient pas d’arme mais une bêche. Il y rencontra par la suite M. Paul Gutzwiller également issu du village et M. Roger Richert de Waldighoffen.

Dans ce camp tous les matins pour le rassemblement, retentissait le fameux "ANTRETEN".

Chaque jour, avant de passer aux travaux d’ordre général et d’intérêts publics, ils devaient jurer fidélité au "Füher Adolf Hitler". Puis en train, ils se sont rendus à une distance d’environ trente kilomètres de leur camp à leur place de travail. Celui-ci consistait principalement à creuser des fondations pour y poser des canons anti-aériens à Rheingönheim près de Ludwighafen.

 troupes allemandes de la seconde guerre mondiale

En août 1944 lors du bombardement de la ville de Ludwigshaffen, par une chaleur torride, ils ont du se réfugier dans des abris "Luftschutz" à 30 mètres sous terre. A leur sortie ils eurent une vision atroce : les immeubles détruits, les personnes gisant au sol et certaines touchées par les bombes au napalm brulaient littéralement.

Puis ce fut le transfert dans la "Wehrmacht" en septembre 1944 dans le camp d’Eisenach près de la ville de Trêves. De là il devait se rendre en train puis à pied au Camp de Marienberg - Westerwald. Le camp se trouvait à ce moment sous presque deux mètres de neige.

Barraquements allemands

Il eut une permission de sortie du 14 au 15 novembre 1944 pour se rendre à "Frankfurt-am-Main".  Pour les repas de midi, les menus étaient partout et toujours les mêmes : pour 1 Mark des épinards et des pommes de terre.

Ils se trouvèrent à quinze Alsaciens à table quand tout à coup surgirent des "SS" avec des têtes de morts sur l’uniforme pour venir leur retirer les titres de permission. Joseph et ses proches en voyant cette manœuvre réussirent à quitter les lieux et sur les conseils d’un ancien sont montés sur le quai pour se réfugier dans des wagons à bestiaux afin d’échapper au ramassage des permissionnaires par les "SS".

Une fois la situation un peu plus calme, et par chance de pouvoir parler la langue allemande, un employé du chemin de fer (Ein Lotze) leur indiqua : "Dieser Personnenzug fährt das Rheintal hinauf" (ce train de voyageurs remonte la vallée du Rhin) et c’est ainsi qu’ils arrivèrent jusqu’à Kehl.

Et là, un nouveau problème : comment passer à présent le pont du Rhin ?

Et c’est en se mêlant aux ouvriers qu’ils ont réussi à arriver à Strasbourg. De là avec les trains d’ouvriers jusqu’à Mulhouse et enfin jusqu’à Altkirch. Ils n’étaient alors plus que cinq. A bout de force et dans un climat de peur constante, ils ont dormi à la gare. Réveillé par un coup de téléphone, ils apprirent que l’on a fait sauter le pont du Rhin à Kehl qu’ils venaient de traverser.

Depuis la gare d’Altkirch, accompagné de M. Antoine Andelfinger, ils ont marché jusqu’à Waldighoffen.

Mme Jeanne Henlin lui a prêté son vélo pour se rendre enfin à Muespach. En passant sous le pont à Steinsoultz le cantonnier Schilz l’a aperçu et a rapporté l’information à M. Théophile Gutzwiller. Il s’est alors caché dans le foin de peur de devoir retourner sur le front.

 

Merci à M. Joseph Brand pour les propos rapportés.

Pascal Groell  2013.

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